La chance... Comme l'évoque Thomas Heaton, un photographe de paysage anglais, dans une de ses vidéos, il faut une sérieuse dose de chance pour capturer LA photo. Mais, il dit surtout que la chance seule ne suffit pas : il faut fabriquer sa propre chance en se plaçant dans les bonnes conditions pour que celle-ci puisse apparaître. Il serait trop simple de n'avoir qu'à compter sur la chance. Et ce ne serait pas très intéressant non plus, en fait. Certain(e)s volent par-dessus les océans, parcourent des centaines de kilomètres en voitures, marchent des heures, campent au sommet de montagnes, se retrouvent les pieds dans l'eau ou la vase, subissent le froid, le vent et la pluie, entourés de bestioles carrément féroces (cf. l'attaque des crabe-zombies), afin de se trouver là où il faut pour (peut-être) pouvoir faire l'image revée. Et encore, si tout se passe bien et que la chance apporte le rayon de lumière qui va bien ou la vague qui déchire tout ! Même sans forcement aller se mettre dans des situations extrêmes, une photo ne demande pas juste à être prise en nous sautant dessus par hasard : il faut aller la chercher soi-même. N'appele-t-on pas les photographes des chasseurs d'images ?
Ai-je la chance de pouvoir faire des photos de l'Ile d'Yeu toute l'année ? Non, je ne pense pas : ce n'est pas une chance, c'est une contrainte : j'y habite ! Pour des raisons professionnelles, par choix aussi, et cela me va très bien ! Certes, je reconnais volontiers qu'il y a des endroits où il fait surement moins bon vivre et d'autres moins propices à la photographie ; mais comme il s'agit d'un choix, je ne considère pas cela comme une chance. Et puis cela vient avec son lot de contraintes et de complexités... Cependant, je peux dire que j'ai eu la chance de ne pas travailler hier quand le ciel s'est subitement dégagé.
Une luminosité bizarre a attiré mon regard à travers la baie vitrée : le ciel était totalement couvert par une couche épaisse et homogène de nuages gris foncé avec une large trouée ensoleillée qui s'approchait par le Sud-Est. Cela faisait déjà longtemps que j'attendais de telles conditions pour pouvoir faire des photos utilisant le contraste entre le ciel gris et sombre et la lumière vive et chaude qui parvient à se glisser sous la couche nuageuse. De la chance ? Non, de la patience... Allez, route aux Sabias !
Une fois installé en haut de mon rocher, filtres en place, télécommande en main, j'ai attendu... J'ai attendu que la légère brise pousse petit à petit le bloc de nuage et que la lumière vienne frapper la Pointe du Châtelet de toute sa force. Je savais que cela allait arriver, il suffisait d'attendre...
En retournant à la voiture, j'ai été éblouis par les cabanes en haut de la plage des Sabias. Le contraste était saisissant entre les cabanes blanches et le ciel gris, entre la douceur des nuages et les arbres pas doux du tout !
Un peu plus loin, de l'autre coté de la Pointe du Chatelet, le paysage était encore plus impressionant avec le ciel gris qui se refletait sur la surface de l'eau et les rochers ciselés par la lumière crue du Soleil ! Absolument magnifique !
J'adore ces ambiances très contrastées, à la limite du dramatique. Cela faisait un moment que j'attendais ces conditions et je n'ai pas été déçu. J'ai même été surpris par la brutalité de la séparation brutale le ciel gris et le ciel pur. D'ailleurs, cela se voit nettement sur l'image satellite prise au même moment.
Et puisque l'on cause météo, il semblerait qu'un sérieux coup de vent se prépare pour lundi. J'ai donc quelques jours pour me préparer et ne pas m'en remettre à la simple chance pour faire des images sympas...